Fédération Régionale d’Agriculture Biologique de Nouvelle-Aquitaine

Municipales 2026 : Quels arguments pour défendre la bio en tant que candidat et comment répondre avec tact aux idées reçues ?

Alors que les collectivités doivent répondre à des attentes croissantes en matière de santé publique, d’environnement et de souveraineté alimentaire, l’agriculture biologique s’impose comme un levier stratégique. Pourtant, elle reste encore trop souvent perçue comme un luxe ou une contrainte budgétaire.

Pour Laure Verdeau, directrice de l’Agence Bio, cette vision est dépassée. Invitée du podcast Business of Bouffe (à écouter ici), elle rappelle que la bio est avant tout un outil d’action publique :

« Si les poissons, les oiseaux et les nappes phréatiques pouvaient voter,
ils voteraient bio. » 


 

Entre protection de l’eau, dynamisation de l’économie locale et justice sociale, les arguments ne manquent pas pour inscrire la bio au cœur des politiques territoriales. Retour sur les points clés qu’elles évoquent, avec des statistiques à l’appui.

 

Alimentation et santé publique :
la restauration collective, un levier clé

Les cantines scolaires et les établissements publics représentent un levier essentiel pour améliorer la qualité de l’alimentation et sensibiliser les citoyens dès le plus jeune âge. Mais, malgré la loi EGalim qui impose 20 % de bio en restauration collective, ce taux plafonne à 6 %.

« Si nous respections simplement cette obligation légale, cela représenterait 1,5 milliard d’euros garantis aux agriculteurs bio français », souligne Laure Verdeau. Un chiffre qui met en lumière l’énorme potentiel de développement pour l’agriculture biologique.

Face aux préoccupations budgétaires des collectivités, plusieurs solutions existent :

  • Adapter les menus en réduisant le gaspillage alimentaire et en repensant les protéines animales.
  • Favoriser les achats en circuit court pour réduire les coûts liés aux intermédiaires.
  • Mettre en place une tarification sociale pour garantir l’accessibilité des repas bio à tous les enfants.

« De nombreuses collectivités prouvent
qu’il est possible d’atteindre 30, voire 50% de bio sans surcoût.
Mais il ne suffit pas de faire Ctrl-C/Ctrl-V de la liste de course,
c’est un vrai changement de projet de l’établissement », insiste-t-elle. 

 

Environnement : protéger la ressource en eau et les sols

Face aux défis du changement climatique, l’agriculture biologique apparaît comme la seule réponse efficace pour préserver l’environnement.

« On n’a jamais fermé un captage d’eau
à cause de l’agriculture biologique ».

Pourtant, chaque année, des centaines de captages sont déclarés impropres à la consommation en raison de pollutions agricoles, obligeant les collectivités à financer des traitements coûteux.

Investir dans la bio en amont permet ainsi de faire des économies en aval. Plusieurs territoires l’ont compris, en développant des partenariats avec des agriculteurs bio pour sécuriser leurs ressources en eau potable.

Autre enjeu majeur : la résilience des sols face aux aléas climatiques. Grâce à des pratiques favorisant la biodiversité et le stockage du carbone, l’agriculture biologique améliore leur capacité à absorber l’eau, limitant ainsi les risques d’inondation et d’érosion.

 

Développement économique : la bio, un vecteur d’emplois locaux

Loin d’être une contrainte, l’agriculture biologique représente une opportunité économique pour les territoires. En moyenne, une ferme bio génère 60 % d’emplois supplémentaires par rapport à une exploitation conventionnelle.

Faciliter l’installation d’agriculteurs bio, c’est donc non seulement préserver l’activité agricole locale, mais aussi créer des débouchés pour les commerces de proximité, les marchés et la restauration locale.

Malgré ces bénéfices, les producteurs peinent encore à accéder au foncier. Or, les collectivités ont un rôle clé à jouer pour faciliter leur implantation, notamment via les plans alimentaires territoriaux (PAT) ou des réserves foncières dédiées.

« La relève des agriculteurs ne sera assurée
que si l’on accueille à bras ouverts
ces 40 % de jeunes qui veulent se lancer en bio »,
alerte-t-elle à juste titre.

 

Justice sociale : rendre le bio accessible à tous

L’une des critiques récurrentes à l’encontre du bio concerne son prix. Pourtant, plusieurs collectivités montrent qu’il est possible de le rendre accessible sans faire flamber les budgets.

Outre la restauration collective, les épiceries solidaires, les groupements d’achats et les AMAP jouent un rôle clé pour démocratiser l’accès au bio. Des initiatives émergent également pour intégrer le bio dans les politiques de santé publique, avec des dispositifs comme les « ordonnances vertes » permettant aux femmes enceintes d’accéder à des produits biologiques via la Sécurité sociale.

L’objectif ? Faire du bio non pas une niche, mais une norme pour tous.

 

Bio et politiques locales : un engagement nécessaire

Dans un contexte de crises sanitaires, climatiques et économiques, inscrire l’agriculture biologique dans les politiques locales apparaît comme une nécessité.

Laure Verdeau le martèle :

« Nous avons déjà laissé partir nos usines…
Ne laissons pas partir nos vaches. » 

Que ce soit pour la santé publique, la préservation des ressources ou la dynamisation des territoires, les élus ont le pouvoir d’agir concrètement. Marchés de producteurs bio, soutien à l’installation agricole, restauration collective vertueuse… Autant d’actions qui peuvent transformer en profondeur l’avenir des territoires.

Une question demeure en vue des municipales 2026 :
quelle place les candidats donneront-ils à la bio dans leurs programmes ?

 

Nous déconstruisons pour vous les idées reçues sur le bio…

Tout comme vous, nous devons faire face aux idées reçues sur l’agriculture biologique.

Notre conseillère, Emma Fortin, nous éclaire sur des idées reçues qu’on a toutes et tous entendues un jour et pour lesquelles nous n’avons pas toujours eu les bons mots pour y répondre…

Idée reçue n°1 : “ Local c’est mieux que bio ”
Il ne s’agit pas d’opposer les deux, l’un renvoie à un mode de production et l’autre à une distance géographique. En considérant les émissions de gaz à effet de serre, l’agriculture biologique en émet beaucoup moins, même quand les produits sont importés d’autres pays. 70% de l’empreinte carbone de l’alimentation est liée à la phase de production. Sous un angle de développement durable, en considérant aussi l’économie et le social, le plus vertueux est d’acheter des produits bio et locaux.

 

Idée reçue n°2 : “ Le bio c’est trop cher ”
Les aliments bio ne coûtent pas nécessairement plus cher que ceux conventionnels, cela dépend en grande partie du mode de distribution. Les agriculteurs bio vendent plus généralement en circuit court, avec au maximum un intermédiaire, ce qui leur permet de se rémunérer correctement tout en vendant à un prix raisonnable. Les collectivités locales peuvent aussi jouer un rôle pour rendre plus accessible les produits bio à travers : les paiements pour services écosystémiques qui garantissent une aide aux agriculteurs bio, les dispositifs de paniers bios gratuits pour certains publics, les expérimentations de sécurité sociale de l’alimentation …

 

Idée reçue n°3 : “ Il ne faut pas opposer les systèmes : bio VS conventionnel ”
Les nombreuses études scientifiques dont celles réalisées par l’Institut technique de l’Agriculture biologique (ITAB) montrent les externalités positives de l’agriculture biologique. Ce modèle agricole du fait de son cahier des charges strict et de ses contrôles, est une garantie pour tous du respect de l’environnement et de notre santé. Le rôle des collectivités et des agriculteurs bio est d’accompagner tous les agriculteurs à tendre vers ce modèle en les soutenant financièrement et en les accompagnant dans l’apprentissage de nouvelles pratiques. L’agriculture biologique n’est pas figée et évolue aussi dans le temps en intégrant de nouvelles pratiques et de nouvelles interdictions.

 

Idée reçue n°4 : “ On ne peut pas nourrir tout le monde avec une alimentation bio ”
Le bureau d’étude Solagro en 2020 publiait une étude montrant qu’on pourrait nourrir le monde en passant à 45 % de production végétale en bio (Afterres 2050). Actuellement, à l’échelle mondiale, nous surproduisons. Dans ce même temps, une part de la population est sous-nutrie pendant qu’une autre est sur-nutrie. Le modèle de production intensif produit également beaucoup de gaspillage alimentaire. Un rééquilibrage global pourrait permettre d’augmenter la production bio.